jeudi 28 juin 2018

C’EST AU PEUPLE PALESTINIEN MARTYR QUE LE SENEGAL ET L’AFRIQUE TOUTE ENTIERE DOIVENT APPORTER LEUR SOUTIEN POLITIQUE DETERMINE


Le Collectif de Solidarité Sénégal-Palestine a saisi l’occasion de la célébration de la journée mondiale des réfugiés, le 20 juin 2018 dernier, pour organiser, à la Place de la Nation à Dakar, un  rassemblement citoyen de solidarité avec le peuple palestinien martyr. C’est le lendemain de cette manifestation qu’est parue, dans les colonnes du journal L’Enquête, une interview de Monsieur Emmanuel Nahshon, porte- parole du ministre israélien des affaires étrangères, pour se prononcer largement sur plusieurs aspects du conflit israélo-arabe, accusant avec insistance les combattants palestiniens de « terrorisme » et de « provocation délibérée ».


Or, les populations civiles de Gaza, qui ont déclenché depuis le 30 mars dernier « La Grande Marche du Retour » afin de retrouver leur terre et leurs foyers spoliés et occupés par Israël depuis 70 ans, font face les mains nues. Avec pour seules armes des lance-pierres et des cerfs-volants, elles sont systématiquement  massacrées par les snippers et les drones de l’armée sioniste, occasionnant ainsi des centaines de morts et des milliers de blessés parmi « ces terroristes et provocateurs ». Cela n’empêche pas pourtant Monsieur le porte-parole de déclarer :  « Israël est malheureusement une victime du terrorisme depuis près de 70 ans » (sic), pendant que les populations palestiniennes sont quotidiennement tuées ou réduites au statut de réfugiés, représentant le 10ème des 70 millions de réfugiés recensés dans le monde par le HCR. 




Alors quand M. Nahshon soutient: « Notre politique et stratégie ne consistent pas à tirer pour tuer des gens de l’autre côté de la frontière », la réalité des faits se révèle   être en porte- à faux avec ses affirmations. Le Secrétaire Général et l’Assemblée Générale des  Nations Unies ont même condamné la répression disproportionnée et barbare pratiquée par Israël contre les populations civiles de Gaza, en demandant la conduite d’une enquête internationale indépendantes à ce sujet. Divers médias dans le monde ont diffusé les illustrations des horreurs et atrocités infligées aux bébés, aux enfants, aux femmes de Palestine, et même aux journalistes ou agents de la Croix Rouge ! Pourtant c’est bel et bien la résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 11 décembre 1948 qui prescrit le retour des réfugiés palestiniens sur leur terre et dans leurs foyers occupés depuis 1948.


Monsieur le porte- parole Emmanuel Nahshon ne se prive pas d’en rajouter : « Vous savez que le but des négociations, c’est la création d’un Etat palestinien indépendant aux côtés de l’Etat d’Israël… Israël a toujours souhaité et démontré sa volonté à faire la paix à maintes reprises. Malheureusement, les Palestiniens, jusqu’à maintenant, refusent d’accepter la légitimité de l’existence de l’Etat d’Israël. » Pareilles affirmations ne résistent pas à la réalité des faits. En effet quand depuis Alger, le15 novembre 1988, le Conseil national palestinien décide la proclamation de l’État de Palestine indépendant et élit Yasser Arafat président du nouvel État,  l’OLP reconnaît dans le même temps la résolution 181 de l’ONU de 1947 qui partage la Palestine en deux États, l’un juif, l’autre arabe, ce qui constitue une reconnaissance de facto de l’existence de l’État israélien. Sur la même lancée, le 13 décembre 1988, devant l’Assemblée générale des Nations unies réunie à Genève, le Président Arafat plaide pour une résolution pacifique du conflit israélo-arabe sur la base des résolutions 181, 242 et 338 des Nations Unes, rappelle le rejet par le Conseil national palestinien et par l’OLP de toute forme de terrorisme et proclame, lors d’une conférence de presse le lendemain, la reconnaissance par l’OLP de la résolution 242 et le droit à l’existence d’Israël. Le 21 avril 1996, le  Conseil national palestinien modifie les articles de la Charte nationale palestinienne d’Avril 1964, corsée en  juillet 1968 après « la Guerre des six jours » de 1967 et refusant jusque là l’existence de l’État d’Israël.  Est-il besoin de rappeler qu’après les accords d'Oslo du 13 septembre 1993, et le Prix Nobel de la Paix 1994 décerné à Yasser Arafat conjointement avec Shimon Peres et Yitzhak Rabin,  ce sont les tenants de l’extrême droite israélienne qui ont  assassiné Rabin le 04 novembre 1995 à Tel Aviv ?

Sur un autre plan, la décision de transfert de l’Ambassade des Etats Unis de Tel Aviv à Jérusalem, prise par le Président Donald Trump,  non seulement est en rupture avec la pratique diplomatique de ses prédécesseurs, mais en plus elle viole allégrement les Résolutions des Nations Unies, notamment la Résolution 476 du Conseil de sécurité du 30 juin 1980 déclarant  nulle et non avenue la décision d'Israël de modifier le statut de la ville sainte, décision considérée comme « une violation du droit international », ce au lendemain de la proclamation unilatérale par l’Etat sioniste de « Jérusalem réunifiée » comme « capitale éternelle et indivisible du peuple juif et de l’Etat d’Israël ». Idem de la Résolution 478 du Conseil de sécurité du 20 août 1980 demandant à Israël de mettre fin à l'occupation de Jérusalem et exigeant des « États qui ont établi des missions diplomatiques à Jérusalem de retirer ces missions de la Ville sainte ».


Aujourd’hui, la volonté ouvertement affichée par Benyamin  Netanyahou, avec le soutien sans fard de Donald Trump, de coloniser toute la Palestine en ne laissant qu’une portion congrue aux Palestiniens au nom du projet d’un « Grand Israël », vise à jeter à la mer tout projet d’établissement d’un Etat de Palestine viable et indépendant, avec Jérusalem-Z Est comme capitale. Incontestablement, la décision de Monsieur Trump encourage les fauteurs de guerre et attise un feu qui risque non seulement d’embraser le Proche et le Moyen Orient, mais aussi de plonger le monde entier dans une guerre aux relents de guerre de religion, de race ou d’ethnie. Comme le dit un proverbe wolof de chez nous, « Gaalu dof du teer, walla book fa muy teer du neex mbokk ya », autrement dit : la pirogue conduite par un fou ne sait pas s’arrêter, ou quand elle finit par le faire, ce sera pour le plus grand malheur de ses proches !  Il est temps d’arrêter Monsieur Trump !


Comment, devant les agissements inacceptables de son gouvernement, Monsieur le porte- parole du ministre israélien des affaires étrangères peut-il avoir la prétention de solliciter le soutien politique de l’Afrique ? « Nous ne le cachons pas, nous avons besoin du soutien politique de l’Afrique. L’Afrique est un acteur incontournable sur la scène mondiale. L’un de nos objectifs, à court terme, par exemple, c’est d’obtenir le statut d’observateur à l’Union Africaine (UA) », souligne t-il. L’Afrique peut- elle se permettre  de violer sa propre charte ? Reprenant dans son préambule l’article  

Deux (2) de la Charte constitutive de l’Organisation de l’Unité Africaine/ OUA (1963), la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (1981) réaffirme l’engagement solennel « d’éliminer sous toutes ses formes le colonialisme de l’Afrique », et rappelle aux États membres leur « devoir de libérer totalement l’Afrique, dont les peuples continuent à lutter pour leur indépendance véritable et leur dignité », et de s’engager « à éliminer le colonialisme, le néo-colonialisme, l’apartheid, le sionisme, les bases militaires étrangères d’agression et toutes les formes de discrimination, notamment celles fondées sur la race, l’ethnie, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l’opinion politique»

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L’Afrique peut- elle  un seul instant envisager d’accorder un statut d’observateur au sein de l’Union Africaine à l’Etat sioniste d’occupation coloniale et d’apartheid qu’est Israël ? Ce que « l’expertise d’Israël peut apporter par exemple dans les domaines de l’agriculture, de l’eau, de la lutte contre la désertification, de la lutte contre le terrorisme », pour citer Monsieur le porte parole,  ne pourra jamais justifier à nos yeux une quelconque complaisance ou complicité vis-à-vis du régime israélien d’occupation et de terreur. 


Une telle question interpelle tout particulièrement notre pays, le Sénégal, seul pays au monde à diriger sans interruption depuis 1975 le Comité des Nations Unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, ce qui lui confère en conséquence la responsabilité, selon nous, de devoir toujours faire plus que les autres, au plan  bilatéral avec Israël comme au sein de la CEDEAO, de l’OCI, de l’UA, de l’ONU ou d’autres instances internationales.

Notons au passage qu’en Décembre 2016, quand le Sénégal a eu le courage de parrainer aux côtés du Venezuela, de la Malaisie et de la Nouvelle Zélande, la Résolution 2334 du Conseil de Sécurité condamnant l’occupation des territoires palestiniens, y compris Jérusalem -Est, Israël s’est empressé de brandir menaces et représailles, allant jusqu’à rappeler son Ambassadeur accrédité à Dakar. Pourquoi le Sénégal, avec le même esprit de fullaak fayda (fermeté et détermination à se faire respecter), devrait-il hésiter à ordonner, au moins comme l’Afrique du Sud, l’expulsion de notre territoire de l’Ambassadeur d’Israël, en guise de dénonciation des atrocités et crimes commis par Israël ainsi que de ses entraves multiples à « l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien » ? N’a-t-il pas fallu la lutte opiniâtre du peuple togolais contre le régime cinquantenaire du clan des Gnassingbé pour faire heureusement annuler le tristement honteux Sommet Afrique – Israël prévu à Lomé en Octobre 2017 ? C’est donc bien au peuple palestinien martyr que le Sénégal et  l’Afrique toute entière doivent apporter leur soutien politique déterminé, dans la conviction forte, partagée avec Nelson Mandela, que « nous savons tous très bien que la libération de l’Afrique ne sera jamais complète tant que les Palestiniens ne seront pas libres ».

Dans l’intérêt de la justice, de la paix, de la crédibilité de l’ONU et du droit international, du respect de la démocratie et de la dignité humaine, du dialogue fécond des religions et de la fraternité universelle, seule la solution à deux Etats peut constituer une solution durable au conflit israélo-palestinien. Et une telle solution exige incontestablement l’établissement d’un Etat de Palestine viable, indépendant, libre et démocratique, avec Jérusalem- Est comme capitale, dans les frontières de 1967 garanties par les Nations Unies.

Fait à Dakar le 24 Juin 2018



Le Collectif de Solidarité Sénégal-Palestine

Contact : Madieye Mbodj, coordonnateur, téléphone 77 644 18 30

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